Pendant de nombreuses années, le silence littéraire de Beccaria a été mis sur le compte de son exclusion du gouvernement milanais alors qu’en réalité, il traversait des crises de dépression périodiques. Saved in: Bibliographic Details; Published in: Revue de science criminelle et de droit pénal comparé De même, le code autrichien promulgué en 1787 par Joseph II ne prévoyait pas de peine de mort ; mais, ici aussi, cette expérience fut interrompue du fait des développements européens de la Révolution et de l’Empire, et en 1803 l’empereur François II rétablissait officiellement la peine de mort. D’une façon générale, on peut dire que, tournant le dos à la conception « théologique » qui attachait au système pénal une fonction rétributive, c’est l’ensemble des philosophes des Lumières qui tendent à considérer la sanction d’abord sous l’angle de son utilité sociale, la « prévention » devenant la raison essentielle du châtiment. Mais on la retrouve également chez les antiabolitionnistes comme Brillat-Savarin ou Prugnon. Kant estime en dernière instance que « seule la loi du talion […] peut fournir avec précision et qualité la qualité et la quantité de la peine ». Dans la logique pénale d’Ancien Régime, l’intention du délinquant, la qualité de ses mobiles, son discernement – de même que les faits qu’il pouvait faire valoir pour se justifier, tout comme son sexe, son âge et sa condition sociale – n’étaient pour les juges que des circonstances diverses, dont l’examen global, qui donnait lieu à une casuistique extrêmement complexe, leur permettait de fixer le niveau de la peine. Contrepoints ne peut exister sans vos dons. Les cas de Pietro Verri et de Cesare Beccaria (1760-1790)Abstract: (The political engagement of the italian philosophers at the time of the lights. Premièrement en augmentant la souffrance apparente ; deuxièmement en diminuant la souffrance réelle. I, Les Constituants, F. Furet et R. Halévi (éd. ), J. 32À présent, il estime au contraire que « dans les délits politiques la qualité des personnes est une donnée essentielle, dont il faut bien tenir compte lorsque l’on établit des peines proportionnées ». » (ibid., p. 403) L’objection la plus articulée, à l’intérieur de la culture philosophique des Lumières, sera néanmoins, en Prusse, celle de Kant, qui critiquera le « sentiment d’humanité affecté » de l’auteur des Délits et des peines, mais aussi sa logique contactualiste et utilitaire. Du reste, en 1785 – en dépit de l’adoucissement certain des pratiques pénales au xviiie siècle en Europe –, le grand jurisconsulte français Muyart de Vouglans, adversaire résolu de Beccaria, réaffirmait avec vigueur les principes du droit pénal de l’Ancien Régime, lorsqu’il rappelait que « le véritable objet de la Jurisprudence criminelle doit tendre, en général, plutôt à la rigueur qu’à l’indulgence »7. À la fin des années 1760, Beccaria se tourne vers l’étude de l’économie, bien qu’aucun de ses travaux ultérieurs n’ait connu le même succès que celui de Crimes et châtiments. Certes, avec Beccaria, s’amorce le processus dans lequel la vérité n’est plus connue à partir du formalisme et de l’arithmétique des indices mais de l’évaluation de la personnalité du coupable46 ; pourtant, il a écrit dans le chapitre VII de son traité, intitulé « Erreurs dans la mesure de la peine » (même s’il s’en prenait en réalité à l’identification entre délit et péché, et que sa véritable cible était ici la conception « religieuse » de la justice) : la véritable et unique mesure des délits est le dommage causé à la nation, et c’est pour cela que se sont trompés ceux qui ont considéré que la vraie mesure des délits est l’intention de celui qui les commet.47. Et quand cela serait, comment un tel principe s’accorde-t-il avec cet autre, qui veut que l’homme n’est pas maître de se tuer, alors qu’il devait l’être s’il a pu donner ce droit à autrui ou à la société tout entière ? Si le Secrétaire florentin a bien inauguré une nouvelle forme de la politique, désormais dissociée du droit, le philosophe milanais opère pour sa part une rupture décisive dans le domaine juridique et politique. Tous les maux s’agrandissent dans l’imagination, et celui qui souffre trouve des ressources et des consolations inconnues et inconcevables pour les spectateurs, qui substituent leur propre sensibilité à l’esprit endurci du malheureux. 20 Edizione nazionale, éd. cit. Tous les jeunes magistrats des cours, […] jugeaient plus selon les principes de cet ouvrage que selon les lois »36. Restituire la giustizia alla società civile rendendola indipendente dal governo, ripristinare la procedura accusatoria su iniziativa dei privati, assegnare allo stato una mera funzione di controllo sui tribunali, delegare le funzioni di accusa, giudizio e sanzione ai magistrati e cittadini eletti dalle assemblee popolari : questi erano gli intenti del progetto di Duport contro i difensori dell’ordinanza del 1670. Dans sa vision très particulière du contrat social et de la « volonté générale », la souveraineté et les lois ne sont qu’une « somme de portions minimes de la liberté privée de chacun ». cit., p. 258-300. » (A. Cavanna, La codificazione penale in Italia, op. Donc, ce sera une situation politique intenable, absurde de surcroît. Des délits et des peines | Cesare Beccaria | download | Z-Library. En effet, en abaissant les nobles au niveau de la plèbe, en réduisant l’aristocratie et les élites bourgeoises « au niveau des personnes de la plus infime et vile condition », « la corruption et les mœurs viles augmentent et se répandent toujours plus »77. « Aspetto di novità, se badiamo, presenta anche il fatto che nella relazione degli “abolizionisti”. On peut ainsi considérer que c’est au philosophe genevois que répond implicitement l’Italien lorsqu’il affirme que « la peine de mort n’est donc pas un droit […] mais une guerre de la nation contre un citoyen, parce qu’elle juge nécessaire ou utile la destruction de son être »14. … la véritable et unique mesure des délits est le dommage causé à la nation, et c’est pour cela que se sont trompés ceux qui ont considéré que la vraie mesure des délits est l’intention de celui qui les commet. 10En outre, pour être bien compris, l’humanitarisme beccarien doit être situé dans l’horizon de ce que l’on peut appeler, avec Michel Foucault, une « punition généralisée »23. citée, p. 106. Ainsi, la thématique de l’amendement doit être mise en rapport avec un argument abolitionniste important, lui aussi nouveau : celui de l’irréparabilité de la peine de mort. Beccaria résume, du reste, l’ensemble de sa philosophie pénale à la dernière phrase de son traité : pour que toute peine ne soit pas une violence d’un seul ou de plusieurs contre un citoyen privé, elle doit être essentiellement publique, prompte, nécessaire, et la plus petite parmi celles possibles dans des circonstances données, proportionnée aux délits, dictée par les lois.9. Voir aussi ce qu’écrivait le juriste Jean-Isaac-Samuel Mongard à Beccaria, le 23 novembre 1776 : « l’esprit de philosophie ou l’humanité, ce qui est la même chose, se généralisa en France d’une manière étonnante. 27Après 1789, c’est justement dans le cadre de l’extension du Code pénal autrichien à la Lombardie, sous domination autrichienne, que l’on demande à Beccaria des « avis », des consulte69. Rousseau, Œuvres complètes, vol. En partie déjà dépossédé de son pouvoir, le roi avait cependant annoncé, dans la déclaration de Versailles du 1er mai 1788, une « révision générale » de l’ordonnance de 1670, reprenant à son compte les idées beccariennes : « Notre objet invariable – déclarait Louis XVI – dans la révision de nos Lois criminelles, est de prévenir les délits par la certitude et l’exemple des supplices ; de rassurer l’innocence en la protégeant par les formes les plus propres à se manifester ; de rendre les châtiments inévitables, en écartant de la peine un excès de rigueur qui porterait à tolérer le crime plutôt qu’à le dénoncer à nos tribunaux, et de punir les malfaiteurs avec toute la modération que l’humanité réclame, et que l’intérêt de la société peut permettre à la loi. 15Il ne saurait être question d’évoquer ici de façon détaillée l’ensemble de ce code fondateur de la modernité juridique que fut le Code pénal français de 1791. C’est dans ce cadre que Beccaria va mener son ultime bataille pour l’abolition de la peine capitale70. Le rapport de la première à la seconde peut être augmenté de deux manières. 31Par-delà le revirement sur la question de l’adultère, il est surtout significatif de remarquer que Beccaria estime qu’il ne faut pas que les peines prévues pour les délits mineurs soient trop infamantes pour certaines catégories de la population. peine de mort translate: death penalty. Or, en matière d’adultère, Beccaria avait plaidé, dans Des délits et des peines, pour la dépénalisation de ce délit (ainsi que pour celle de l’homosexualité, de l’avortement et du suicide). Et quand cela serait, comment un tel principe s’accorde-t-il avec cet autre, qui veut que l’homme n’est pas maître de se tuer, alors qu’il devait l’être s’il a pu donner ce droit à autrui ou à la société tout entière ?12. Il ne s’agit point de déclamer contre les raisonneurs, les philosophes, les théoristes ; voilà des hommes lésés qui sentent leur perte, qui ne consultent que leur intérêt, qui sollicitent des lois exécutables et exécutées. Les travaux de Beccaria ont fondamentalement amélioré le système de la justice pénale dans de nombreux pays. 46 Comme l’écrit Stefan Glaser, « Beccaria a frayé le chemin au principe du subjectivisme du droit pénal, bien qu’il n’ait pas voulu reconnaître le concept de culpabilité, en considérant qu’il est inaccessible au jugement humain » (S. Glaser, « Beccaria et le concept de l’état de droit », in Atti del convegno internazionale su Cesare Beccaria…, op. 22 Sur ces « limites » naturelles de la pensée de Beccaria, « précurseur mais aussi homme de son temps », voir M. Delmas-Marty, « Le rayonnement international de la pensée de Cesare Beccaria », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, XIX, 1989, 2, p. 252-260. Dans son Prix de la justice et de l’humanité, en 1777, le seigneur de Ferney estime qu’« un homme dévoué tous les jours de sa vie à préserver une contrée d’inondations par des digues, ou à creuser des canaux […] rend plus de services à l’État qu’un squelette branlant à un poteau par une chaîne de fer » ; « un pendu n’est bon à rien […], je ne parle pas d’humanité, je parle d’utilité » ; « il ne s’agit pas de discuter quelle est la punition la plus douce, mais la plus utile. Le droit de punir, op. ), vol. Pourtant, la prison apparaît malgré tout comme l’horizon de la pensée beccarienne. Vocabulary on La peine de mort for preparation of oral examination Learn with flashcards, games, and more — for free. Le fait qu’en 1868, John Stuart Mill ait plaidé en faveur du maintien la peine capitale pose la question de savoir si sa prise de position constitue une conséquence possible du principe d’utilité. Van den Heuvel (éd. Edition originale française à Philadelphie 1766. L’essai de Beccaria porte sur la critique du système juridique existant qu’il estime confus et imprécis, largement fondé sur un mélange de droit romain et de coutumes locales plutôt que sur la rationalité. En matière de délits mineurs, ceux-ci verront dans la non exécution de la loi la cause principale de leur fréquence. L’Incorruptible estimera que c’est comme « rebelle » et comme « ennemi » de la nation que le roi doit mourir. ». Tandis que la « volonté générale » rousseauienne est un concept abstrait qui transcende la société, la « volonté de tous » est une désignation concrète qui entend préserver l’idée qu’une société est faite d’individus particuliers dont il faut, autant que possible, respecter les libertés individuelles. Partagez le !TweetE-mail. La vie adulte de Beccaria est ternie par des difficultés familiales et des problèmes de santé. Précisons néanmoins que le mot arbitrium indique, dans l’Ancien Régime, le droit qu’avaient les magistrats d’arbitrer les peines, de choisir la plus adaptée. Loi de nature et fondement du droit en Italie à l’époque de Beccaria », Studi settecenteschi, XXIII, 2003, p. 197-278 ; Id., « Il problema Beccaria », Rivista storica italiana, CXVI, 2004, 3, p. 834-871. Celles-ci ne sont qu’une somme de portions minimes de la liberté privée de chacun ; elles représentent la volonté générale, qui est l’agrégat des volontés particulières. cit. Comme l’écrit A. Cavanna, « Giustizia e leggi a Milano nell’età di Beccaria », in Cesare Beccaria tra Milano e l’Europa : Convegno di studi per il 250o anniversario della nascita…, op. J’y vois partout, non pas seulement les avocats, mais surtout le ministère public, s’étayer de vos principes et citer, sans cesse, l’immortel écrit des Délits et des peines. Il meurt le 28 novembre 1794 dans sa ville natale de Milan. La guillotine montre que désormais, dans un régime économique différent, « on substituera à des peines qui n’avaient pas honte d’être “atroces” des châtiments qui revendiquent l’honneur d’être “humains” »65. Je répondrais aussi que l’égalité des peines ne peut être qu’extrinsèque, cette sensibilité étant en réalité différente en chaque individu ; et que l’infamie d’une famille peut être effacée par le souverain avec des démonstrations publiques de bienveillance envers l’innocente famille du coupable. Relance économique : qui pourra échapper à la ruine qui menace ? 56 M. de Robespierre, « Premier discours sur le jugement du roi. Mais après son succès rapide, il le republie et assume en être l’auteur. À l’âge de huit ans, Beccaria est envoyé dans un pensionnat jésuite à Parme. citée, p. 641. 16La pénétration des idées de Beccaria en France est repérable aussi, et souvent explicite, dans les cahiers de doléances de 178937. Le regard de René Le Honzec. 13 J.-J. ), Paris, PUF, 1958. ), Milan, Garzanti, 1987, volume dans lequel ont été judicieusement réunis, en appendice au traité, les principaux textes des Atti di governo de Beccaria rédigés à l’époque de la Révolution française. Il proclamait, en effet, les principes que Beccaria avait énoncés : en particulier l’utilité et la nécessité de la peine, la légalité des peines, la non rétroactivité de la loi pénale, la proportionnalité des peines aux délits41. 11 C’est là un des points qui a suscité un débat animé et de multiples contestations, même parmi les partisans français de Beccaria. Le « “surpouvoir” monarchique », fondé sur une économie de la dépense et de l’excès, ne permettait pas de résoudre, à la fin du xviiie siècle, la crise de l’illégalisme populaire, qui se manifestait par toute une série d’attaques à la propriété et aux biens industriels, de petits larcins qui étaient tolérés ou impunissables du fait même de la sévérité des lois. Mais, en 1791, le marquis milanais ne peut surtout plus accepter que les peines infamantes soient prescrites « sans distinction de personnes », car « le bâton, qui peut corriger un faquin, avilit et anéantit un noble, un honnête négociant et toute personne civile » ; si bien que l’on doit avoir « de très grands égards envers la condition des personnes »75. : Souviens-toi de mon ordre de fidélité et discrétion totale, sous peine de mort. Comme le souligne Duport, conformément à Beccaria, la peine de mort ne peut être exclue « lorsqu’un chef de parti est arrêté, et que son existence, en prolongeant la guerre et l’espoir de ses adhérents, peut compromettre la société tout entière » ; dans ce cas, « sa mort est indispensable, et dès lors elle est légitime »55. Intelligence artificielle : Bercy vs Beauveau, la bourse ou la vie ? Beccaria pensait que les peines pour les crimes devaient être proportionnelles à la gravité de l’infraction et que les criminels ne devaient pas être punis avant d’avoir été reconnus coupables par un tribunal. Elle était aussi tout à la fois « démocratisée » et «  adoucie » par la mise en application de la guillotine, à partir de 1792. L'appel de l'association Students for liberty. citée, vol. ), Milan, Mediobanca, 2000-2008 ; néanmoins, le « voto sulla pena di morte » de 1792 – que nous évoquerons ci-dessous – ne sera publié que dans le volume XVI, à paraître. Tout d’abord, contrairement à l’opinion commune selon laquelle Beccaria serait un partisan inconditionnel de l’abolition de la peine de mort, celui-ci introduit tout de même deux restrictions à cette mesure. Ainsi, les jurys populaires (le jury d’accusation et jury de jugement) représentent le grand renversement de la Révolution française en matière pénale43 ; et ce renversement ne sera pas remis en question par la suite, en dépit de l’« involution » du code napoléonien, qui se traduira par un accroissement de la sévérité, allant de pair avec une progressive réduction du pouvoir des jurys et un renforcement de celui du ministère public et des juges. Dans son ouvrage de moins de 100 pages paru anonymement à Livourne en juillet 1764 (Dei delitti e delle pene), Cesare Beccaria accuse le droit de punir traditionnel qui remonte à Rome.Brisant tout lien entre péché et crime, réclamant la décriminalisation du suicide et de l'homosexualité, il propose de remplacer l'arbitraire des délits et des peines par leur légalité. » Sur la philosophie de Beccaria, voir aussi P. Audegean, « Passions et liberté. Dans le droit de punir « moderne » dont Beccaria dessine les contours, la peine devient, en revanche, essentiellement une exigence sociale, née d’une concession minimale de la liberté des citoyens, garantie par la « fiction » d’un pacte social5. Comme l’écrit l’auteur des Délits et des peines : Quel peut être ce droit que les hommes s’attribuent de trucider leurs semblables ? En France, l’ordonnance de 1670 avait institutionnalisé une pratique qui n’était auparavant que de l’ordre de l’usage, et qui, lors des discussions préparatoires à l’ordonnance, fut critiquée par Lamoignon, car elle plaçait l’accusé « dans la nécessité inhumaine ou de se parjurer ou de s’accuser lui-même » (voir J.-M. Carbasse, Histoire du droit pénal…, op. À l’époque des Délits et des peines, celui qui écrivait que « le despotisme d’un grand nombre d’hommes ne peut être corrigé que par le despotisme d’un seul » espérait que le despotisme éclairé – en l’occurrence celui de Marie-Thérèse d’Autriche – permettrait de « corriger » celui des nobles, dans le cadre d’une critique des corps intermédiaires, qui étaient l’une des cibles principales du groupe des philosophes du Caffè. Beccaria met au monde le débat qui sévit depuis plus de deux siècles entre les partisans de la répression et ceux de la prévention, que Beccaria appelle de ses vœux. On rend un mode de punition plus exemplaire en augmentant la souffrance apparente ; on le rend plus économique en diminuant la souffrance réelle. L’avantage de la peine d’esclavage c’est qu’elle effraie davantage celui qui la voit que celui qui la subit ; en effet le premier considère toute la somme des moments malheureux, et le second est distrait du malheur futur par le malheur du moment présent. Des conflits patrimoniaux entre ses frères et sœurs aboutissent à des litiges l’éloignant de son travail pendant de nombreuses années. Ils sous-entendent que ce n’est plus du souverain que les sujets tiennent leurs droits, car c’est la nature qui les a donnés aux hommes ; et c’est désormais la société qui, dans le respect des droits naturels, doit les garantir aux citoyens. ), J.-C. Casanova (trad. Le crime habite la terre, et la grande erreur des écrivains modernes – affirme en effet Prugnon – est de prêter leurs calculs et leur logique aux assassins, aux voleurs à main armée […]. Haut fonctionnaire depuis 1771, s’étant occupé dans les années 1770 et 1780 de questions économiques, Beccaria dirigeait depuis 1789 le département du Consiglio di Governo milanais qui était responsable de la juridiction en matière de sécurité pénale, y compris pour les questions relatives à la police, aux prisons, et aux tribunaux. 26Avant d’en venir aux textes de 1791 et 1792, qui représentent le dernier moment de la réflexion de Beccaria en matière de pénalité et de peine de mort, il convient de rappeler qu’avant la Révolution française c’est en Toscane et en Autriche que ses idées ont trouvé leur plus complète traduction législative. Limitons-nous, à cet égard, à évoquer les points de vue de Voltaire et de Diderot. » (, « Aspetto di novità, se badiamo, presenta anche il fatto che nella relazione degli “abolizionisti” manca qualsiasi accenno a quei presupposti contrattualistici del diritto di punire che avevano costituito una delle molle propulsive della irruente polemica originaria. Je répondrais aussi que l’égalité des peines ne peut être qu’extrinsèque, cette sensibilité étant en réalité différente en chaque individu ; et que l’infamie d’une famille peut être effacée par le souverain avec des démonstrations publiques de bienveillance envers l’innocente famille du coupable. En effet, autant Duport que Le Pelletier, ou Robespierre, reprennent la conception de Beccaria selon laquelle le droit social ne peut prévaloir sur le droit naturel et inaliénable de l’homme à la vie. Le supplice d’Ancien Régime était la marque d’un régime de production où les forces de travail, et donc le corps humain, n’avaient pas l’utilité et la valeur qui leur seront attribués dans une économie de type industriel. Si 1764 est le moment des idéaux – sinon des utopies –, 1791 représente celui où prédomine désormais le principe de réalité pour un auteur qui, à l’époque des réformes, n’avait peut-être pas mesuré toute la portée révolutionnaire de son pamphlet philosophique ; car ce libriccino fortunato, selon l’expression de Manzoni, ne remettait pas seulement en cause les principes de la justice de l’Ancien Régime, mais aussi ceux de sa société. ), Milan, Mediobanca, 1984, p. 129. 17De tout ceci, le Code pénal de 1791 va être la réalisation, au moment où se mettra en place en France une « autre justice »42. Pendant son mandat, il se concentre principalement sur les questions d’éducation publique et de politique du travail. Et les partisans de la peine de mort tireront argument de cet accroissement du nombre de condamnations à mort pour dire: «Eh bien, vous voyez bien qu 'il ne faut pas renoncer à la peine de mort, puisque les jurés la prononcent de plus en plus fréquemment ».
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